Une démarche de responsabilité sociétale crédible et engagée intègre forcément des actions liées à la sécurité des collaborateurs et bien entendu des clients, consommateurs. Ainsi, dans le contexte actuel, les décideurs (dont les investisseurs) peuvent difficilement passer à côté de l’intégration des enjeux ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) dans leur management et leurs activités. Ils s’appuient sur les données ESG pour orienter leur choix vers les performances durables qui dépendent de la qualité du reporting extra-financier. Si des progrès ont été réalisés, les indicateurs ESG présentent encore des lacunes dont certaines imprécisions méthodologiques.
Il convient d’améliorer la robustesse de ces indicateurs et de les rendre plus dynamiques (moins statiques) afin de mieux traduire les efforts réalisés, mieux piloter les initiatives engagées, mieux ajuster les objectifs et perspectives de progrès et mieux communiquer.Le 17 février 2020, 6 ans après son premier rapport, l’Alliance pour la transparence des entreprises a communiqué son étude sur le reporting extra-financier établie à partir de données de 1 000 sociétés européennes, dont plus de 100 françaises. Le résultat est éloquent : le reporting ESG n’est pas à la hauteur des attentes et des enjeux. La révision de la Directive de Reporting Non-Financier (NFRD) semble plus que jamais inévitable.
Un bilan médiocre
700 critères ont été adoptés pour mesurer la qualité des données fournies par les entreprises concernant les risques et les impacts environnementaux, sociétaux et de gouvernance. L’objectif est de créer une base de données géographique par domaine d’activité. 96% des entreprises interrogées déclarent des engagements sur l’environnement et le social mais seulement un tiers d’entre elles mettent en place des propositions concrètes pour y répondre.
56% des sociétés indiquent un risque stratégie en lien avec le développement durable cependant uniquement 7% l’insère dans leur stratégie. Pire encore, seulement 46% des entreprises du secteur de l’énergie invoquent le climat comme principal risque. Il convient de noter que l’évaluation est faite sur le Scope 1 et 2 mais pas sur le Scope 3[1], ce qui occulte une partie importante des enjeux prioritaires en n’intégrant que les émissions liées aux consommations d’énergie directes et indirectes. Par ailleurs, les sociétés du secteur financier ont des objectifs climatiques (20,5%) « trop » faibles étant donné le rôle important qu’elles devraient jouer dans la transition bas carbone. Enfin, seulement 13,9% des entreprises déclarent que leur stratégie climatique est compatible avec les accords de Paris. Même les secteurs avec les scores les plus élevés (extraction d’énergie et de ressources) rapportent moins de 30% de données pertinentes pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C.
Vers une évolution de la directive
Le reporting ESG n’étant toujours pas à la hauteur de l’urgence climatique, de nombreuses voix s’élèvent pour une standardisation des rapports et une réglementation spécifique pour la gouvernance. Il en résulte que les données extra financières collectées sont souvent peu fiables et inexploitables pour les investisseurs. De plus, l’exercice de reporting ESG est en général onéreux dans la mise en place, difficile à encadrer – en tout cas demande une réelle expertise et montée en compétence. Dans ce contexte, la Commission Européenne ouvre une enquête pour consulter l’ensemble des parties prenantes jusqu’au 14 mai 2020 en vue de la révision de la NFRD.